N'est pas Montherlant qui veut

Un jeune homme rentre de voyage à New York. Profitant d’une insomnie causée par le décalage horaire, Il écrit à une femme qu’il appelle «mon amour». Il écrit une très longue lettre qui oscille entre confidences intimes, flashbacks sur leur relation amoureuse et digressions personnelles autour de l’Amour et des Femmes. Au fil des pages, le ton se fait plus distant, parfois brutal. On comprend qu’il veut rompre et que cette lettre sera sa lettre d’adieu. Mais il n’a visiblement pas envie de rompre avec élégance…

A la lecture du dernier roman de Yann Moix, « Une simple lettre d’amour » on ne peut s’empêcher de penser à Henri de Montherlant et à l'un de ses chefs d'oeuvre "Les jeunes filles". Qu’aurait pensé le grand homme de cette pâle copie griffonnée d’une lettre de Costals à Solange ? Espérons d'ailleurs que Yann Moix n'avait pas cette ambition en écrivant ce livre...car il est raté.


Il écrit comme on prend un selfie : sans cadrage, sans lumière, sans idée...à la va-vite. Un signe des temps dira-t-on… à moins que ce ne soit de la paresse…. pour faire un coup médiatique et vendre du papier. Yann Moix ne structure pas, n’écrit pas. Il juxtapose des images, toutes plus crues les unes que les autres, sans jamais réussir à toucher, à émouvoir. Il confond « narcissisme cynique» avec «vulgarité exaltée».


Deux éléments semblent l’obséder à l’envi (des dizaines de fois) : la pénétration et le sperme (et je suis poli car ce ne sont pas les mots qu’il emploie…). En lisant, on n’est même plus choqué, on se demande seulement à quoi rime ce monologue trash, bien loin du lyrisme des « nuits fauves ». Mais tout cela n’est rien à côté du ridicule des quatre dernières pages : Une fin grandiloquente où la vulgarité fait place à la mièvrerie. Et on est toujours pas ému.


Soyons magnanime, Yann Moix n’avait certainement pas dans l’idée de rivaliser avec Henri de Montherlant lorsqu’il a eu l’idée de son roman. Connaissant son ego...Enfin je l’espère ! 




Alors si vous avez envie de découvrir un réel chef d’oeuvre d’écriture, je vous invite à lire « Les jeunes filles ». Publié par H. de Montherlant en 1936 , il fait partie d’un cycle de quatre romans: *les Jeunes filles*, *Pitié pour les femmes*, *Le démon du bien* et *Les lépreuses*. 
Dans le premier, le personnage de Costals est un écrivain célèbre, adulé par les femmes qui veulent toutes être aimées de lui. Costals est un homme solitaire, uniquement passionné par son travail d’écrivain et qui ne vibre, de temps en temps, que pour la conquête des femmes. Le livre est construit autour d'un échange de lettres entre lui et plusieurs de ses conquêtes. L’écriture est sublime, rythmée et vive. Un vrai bijou de littérature.

En voici un petit extrait:

"En se penchant un peu en arrière, il voyait, derrière le dos de Solange, la jeune femme qui était assise à côté d'elle ; adossée dans son fauteuil, elle écoutait, bouche entrouverte et les yeux clos. Elle n'était pas jolie, mais Costals la désirait : premièrement parce qu'il trouvait convenable que, dans la même minute où il caressait pour la première fois une jeune personne, il en désirât une autre; deuxièmement parce que, donnant l'apparence du sommeil, il était impossible qu'elle ne levât pas en lui la pensée d'abuser de ce sommeil; et enfin parce qu'il lui semblait que, pour éprouver une telle extase d'un phénomène aussi insipide que cette musique, il fallait qu'elle fût détraquée ; or, il n'aimait que les filles saines et simples, comme Solange, c'est pourquoi cela lui était agréable d'avoir envie d'une femme détraquée."




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