Warhol et Associés


Depuis la mi-septembre s'est ouverte une magnifique exposition autour d'Andy Warhol au Metropolitan Museum of Arts de New York.

Plus qu'une rétrospective, il s'agit d'une impressionnante installation combinant les oeuvres les plus emblématiques de Warhol avec celles d'autres artistes contemporains, tous visiblement influencés par lui. On citera ainsi Jeff Koons, David Hockney, Gilbert & George, le brésilien Vik Munis, le chinois Ai Weiwei ou encore Haruki Murakami. Au total soixante artistes sur trois générations, représentant cinquante années de création.

Dès l'entrée, c'est le maître Andy Warhol en personne qui vous accueille... enfin plutôt ses deux spectaculaires autoportraits. Il a le visage tranquille, une main sur le menton, deux doigts sur le coin de sa bouche : on dirait un sphynx... prêt à poser ses questions. L'exposition, très didactique, est conçue comme un dialogue entre une multitude d'artistes contemporains. Elle s'organise autour de cinq grands thèmes, permettant la mise en scène d'oeuvres éloignées par le temps, l'espace ou la technique picturale. On croirait que Warhol lui-même est revenu composer cette Factory temporaire.


From banality to disaster
Première série de salles autour des images de notre quotidien. La publicité d'abord élevée au statut d'art. On y retrouve bien sûr les boîtes Brillo, la série Coca-Cola et la boite de soupe Campbell. Détournement de marques pour lui mais le message se fait plus militant voire politique avec des artistes des années quatre-vingt-dix. De la publicité on passe alors aux images de faits divers. Elles envahissent nos écrans de télévision ou les premières pages des journaux, mais retravaillées par Warhol, ou Basquiat, elles deviennent oeuvres d'art. Pas de détournement cynique de publicités, plutôt la mise en scène de l'horreur dans notre quotidien.

Celebrity and power
Nous quittons l'ombre pour la lumière des stras. Pas de doute, c'est bien Andy Warhol qui a fait des beautés éphémères des œuvres d'art éternelles. De Marylin à Jacquie Kennedy en passant par Liz Taylor. Portraits tirés de Polaroïds colorisés: une technique combien de fois copiée. Dans cette galerie de célébrités, Jeff Koon trouve néanmoins un chemin très personnel avec une statue grandeur nature en céramique blanche et or de Mickael Jackson accompagné de son singe fétiche. Une kitcherie que le roi de la Pop n'a pas du renier.

Shifting identities
Ici la question du genre et de la sexualité nous est posée graphiquement, crûment parfois. Parmi les plus belles pièces on remarque,une magnifique composition de Warhol, en noir et blanc réalisée avec un montage de photos de Jean-Michel Basquiat dans la pose du David de Michel Ange. Ensuite, un incroyable tableau intitulé QUEER de Gilbert et George les représentant debout au milieu de graphitis et de vitres cassées.Un manifeste sur l'homophobie dans la Grande-Bretagne des années Thatchers. Enfin, David Hockney nous renvoit l'image sereine d'un nu allant à la douche, sensuel et pudique à la fois.

Consuming images - Appropriation, Abstraction and Seriality -
Puis vient le temps de la dérision. Ici on joue avec la multiplication quasi industrielle des représentations d'objets comme des motifs décoratifs. Parfois on s'amuse avec les matériaux utilisés. Ainsi Vik Munis utilise le chocolat sur une surface blanche pour réaliser l'image d'un incendiaire en action. Une finesse des détails, un réalisme saisissant. Allan Mc Collum, choisit l'auto-dérision: une série de petits tableaux encadrés sans rien d'autre au centre. Juste un aplat de noir. Une invitation pour le spectateur d'y mettre ses propres images.

No boundaries - Business, Collaboration and Spectacle -
Le dernier thème de cette exposition, associe Warhol à deux grands noms de l'exubérance contemporaine: Jeff Koon et Haruki Murakami. Aux compositions florales de Warhol, répondent vivacité des couleurs et abondance de motifs de deux autres. Comme une ultime explosion de joie, un dernier coup de fouet visuel. 

Vient alors le temps de quitter l'exposition par un tunnel  plongé dans la pénombre. Des installations vidéos délirantes... Nuages de Super Mario sur grand écran, montages vidéos d'émissions de la télé-réalité. On dirait que la boucle est alors bouclée. Des boites de soupes magnifiées par Warhol dans les années soixante, on passe ici à la mise en scène de notre société d'images, où chacun aspire à ses vingt minutes de gloire ! Dernier clin d'oeil du "maître" au détour de la dernière salle. Un mur entier composé de ses vaches polychromes, associé à des ballons argentés gonflés à l'hélium, flottants librement dans la pièce et mus par un ventilateur. Le spectateur est alors immergé physiquement dans l'oeuvre. Acteur malgré lui de ce ballet de ballons où se reflètent les vaches et qui monte et descendent au gré de l'air. Comble du plaisir, on a de droit de jouer avec les ballons.

L'oeuvre léguée par Andy Warhol n'est pas qu'une somme de tableaux, photos ou montages vidéos universellement connus. Mort il y a tout juste vingt-cinq ans, il a été précurseur de nombreuses techniques graphiques. Il a su imposer un état d'esprit, une impertinence, mais aussi un regard sur les choses qui continue d'alimenter l'art contemporain depuis plus de cinquante ans.

L'exposition REGARDING WARHOL, Sixty artists, Fifty years
au Metropolitan Museum of Arts - New York
du 18 septembre au 31 décembre 2012



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